Conte Touvine, rapporté par Luda in Peine-Misère et Bonheur la Chance et conté par Laurence Bart.

Il était une fois et il est encore un pauvre berger. Il n'avait ni parents, ni amis, ne possédait nul bien. Il gardait les moutons du riche Karaty-Khan et pour tout salaire il recevait beaucoup de coups et très peu de nourriture. Les larmes ne séchaient pas dans ses yeux, la peine ne quittait pas son cœur. Voilà comment vivait le pauvre berger.
Un jour un agneau se cassa la patte en buttant sur une pierre. Le pauvre berger était au désespoir :
- Que vais-je devenir ? Karaty-Khan va me couper mes manches avec mes bras, il va me couper mon bonnet avec ma tête !...
Renard rouge passait par là. Il demanda :
- Quel est ton malheur, berger ?
- Mon malheur est grand ! Un agneau s'est cassé la patte, il va falloir l'abattre et Karaty-Khan me tuera.
- La nuit est toujours sombre avant l'aube. Cesse de te tourmenter, dit Renard rouge. Fais plutôt cuire cet agneau et offre moi le repas de l'amitié. Ensuite je te dirai ma pensée.
Le pauvre berger obéit. Après le repas, Renard rouge parla :
- Maintenant je suis ton frère nommé et je vais te rendre heureux. Tu épouseras la belle princesse Billing, la fille de Kourbouston-Khan du Pays d'en Haut et tu seras heureux avec elle.
- As-tu perdu la raison ? C'est impossible ! s'exclama le pauvre berger.
-C'est passible, et ce sera. Je suis ton frère nommé, j'ai déjà trompé six khans et le septième je l'ai eu par ruse. attends-moi et ne t'inquiète de rien. Renard rouge a grimpé sur l'arc-en-ciel et sur la route des sept couleurs il courut au Pays d'En Haut au campement de Kourbouston-Khan. Il entra dans la yourte du khan et s'inclina jusqu'à terre.
- Comment vas-tu, illustre Khan ? Comment va ton illustre cheval ? Comment va ton bétail ?
- Je vais bien. Mon cheval et mes troupeaux vont bien. Et toi, tu vas bien ? Quelle nouvelle m'apportes-tu ?
- J'apporte une nouvelle importante: Karaty-Khan, le Khan du Pays d'En Bas qui a de grandes richesses et des troupeaux innombrables, voudrait marier son fils avec ta fille, la belle princesse Billing.
- Pourquoi pas ? dit Kourbouston-Khan. Il est bon que deux nobles et riches khans fassent alliance. Fais venir le fiancé !
Renard rouge courut le long de l'arc en ciel. Il rejoignit le pauvre berger et le fit se baigner dans l'eau tiède. Et lorsque le pauvre berger lavé et fut nettoyé, il devint un jeune homme plus svelte qu'un peuplier, plus beau qu'un croissant de lune! Il le vêtit de beaux habits et le mena par la route des sept couleurs au Pays d'En Haut. En arrivant au campement de Kourbouston-Khan, Renard rouge fit la leçon au berger :
- Rappelle-toi, tu es le fils de Karay-Khan. Tiens toi avec fierté, salue a mi-ceinture, ne courbe pas la tête !
Kourbouston-Khan les reçut avec grands honneurs. Le berger lui et plut à sa fille la belle princesse Billing. Si bien que le Kahn dit à Renard rouge.
- Tu vas annoncer à Karaty-Khan que nous faisons alliance. Qu'il prépare les fêtes du mariage. En attendant, je garde son fils chez moi. Nous arriverons dans trois jours. Renard rouge s'inclina jusqu'à terre. Avant de partir, il dit à l'oreille du berger :
- Il me reste encore des choses à faire, mais tout ira bien. J'ai déjà trompé six khans et le septième je l'ai eu par ruse ! Aie confiance !
Renard rouge descendit en courant la route des sept couleurs. Il entra en courant dans la yourte de Karaty-Khan. Renard rouge avait la queue entre les jambes, les oreilles couchées, les pattes tremblantes. En le voyant ainsi, Karaty-Khan s'alarma :
- D'où viens-tu Renard rouge ? Pourquoi es-tu si effrayé ?
- Ah, noble Kahn ! J'apporte une mauvaise nouvelle ! Je suis allé au Pays d'En haut, chez Kourbouston-Khan qui commande au feu du ciel. Il est très irrité contre toi. Il dit que tu ne lui payes pas tribut et que, pour te punir, il viendra d'ici trois jours et brulera de sa foudre tout ce qui vit sur tes terres !
Karaty-Khan se mit à trembler. Il suait de peur et suppliait Renard rouge :
- Toi, le sage, toi, le rusé, sauve moi !
N'y a-t-il pas un endroit ou je puisse me cacher de la colère de Kourbouston-Khan ?
Renard rouge réfléchit longuement. Puis il s'écria :
-J'ai trouvé !Appelle ton peuple, noble Khan; et ait creuse une caverne dans la montagne. en même temps fait apporter par cent chameaux une grande dalle de pierre. Tu entrera s dans la caverne avec ta suite, la dalle de pierre fermera l'entrée et tu resteras à l'abri. Quand le danger sera passé, , je te libèrerai.
Et Karari-Khan rassembla tout son peuple et fit creuser une profonde caverne où il se cacha avec sa suite. La dalle de pierre amenée par cent chameaux ferma l'entrée de la caverne. Alors Renard rouge s'adressa à tous les gens rassemblés et parla :
-- Karary-Khan vous faisait travailler sans mesure et vous châtiait sans raison. Il est entré dans la montagne. Désirez-vous le voir en sortir ?
- Non ! ont répondu les gens d'une seule voix.
- Alors laissons le là où il est, dit Renard rouge. Choisissez vous un autre Khan. Votre vieux sage, serait un très bon khan et le pauvre berger, jeune et vaillant, sera son fils, son héritier, le voulez-vous ?
- Oui, nous le voulons ! ont répondu les gens.
Quand peu après, Kourbouston-Khan avec la belle princesse Billing et son gendre descendirent la route des sept couleurs, on les accueilli avec grands honneurs et grande joie. Trois jours et trois nuits ont duré les fêtes du mariage? Trois jours et rois nuits, le peuple festoya, chanta et rit. Et celui qui s'égayait et riait le plus c'était Renard rouge. Trois jours après la noce, vint un grand nuage noir. Un éclair en jaillit qui frappa la dalle fermant l'entrée de la caverne. La montagne s'écroula et ensevelit à jamais Karaty-Khan et sa suite. On n'en entendit plus jamais parlé.
Quand au berger, il vécut très longtemps, et fut un bon Khan heureux auprès de sa belle princesse Billing.